De la Mère à la Terre en Outre-mer

Le long du lagon mahorais, ni canne ni bateau, la pêche se fait à l’aide d’une grande moustiquaire colorée : le djarifa. Et c’est une affaire de femmes. En petits groupes, elles se succèdent au bord de l’eau comme l’ont fait leurs mères et leurs grands-mères avant elles. Elles chantent pour se donner le courage de rabattre dans leur filet les petits poissons, qui leur serviront de repas. À l’heure de la sobriété alimentaire, si cette pratique traditionnelle tend à se raréfier, des femmes luttent pour la remettre au goût du jour.

Le tressage est un savoir-faire transmis de génération en génération, de mère à fille, totalement indissociable de l’identité des Polynésiens en particulier dans les îles Australes. Si les tresseuses rivalisent de créativité dans la réalisation de leurs chapeaux, aujourd’hui l’art du tressage devient aussi une alternative écologique au plastique. Les paniers tressés remplacent les sacs à usage unique, les cordages plastifiés se font en coco et même les coraux pourraient être bouturés grâce au tressage. Les femmes deviennent alors précurseurs avec leur savoir ancestral.

Dans l’archipel des Marquises, le secret des plantes a presque été oublié mais, depuis quelques années, des Marquisiennes se battent pour conserver cet héritage précieux des premiers habitants. Arrivés de lointains archipels et totalement coupés du reste du monde, ils n’avaient pas d’autre choix que de se soigner avec leurs plantes. Aujourd’hui, certaines ont consigné ce savoir et perpétuent cette tradition de soin sans vouloir surplomber la médecine actuelle mais plutôt en la complétant grâce à ces connaissances ancestrales sur lesquelles s’appuient de plus en plus de praticiens en Polynésie française.

Dans la commune de Bandrélé, la récolte du sel repose sur un savoir ancestral transmis par les femmes. On les surnomme les Mamas Shingo (“mamans du sel”), elles ne sont plus que 21 et s’attachent à perpétuer cette tradition, menacée de disparition. Plus qu’une denrée alimentaire, ce trésor blanc possède des vertus curatives et s’inscrit dans une démarche écologique.

Dans la communauté Kali’na, l’abattis, pratique agricole sur brûlis, se transmet de femme en femme depuis des millénaires. Aujourd’hui il se révèle être un modèle d’agroécologie respectant l’équilibre de la nature, tout en assurant l’autosubsistance des peuples autochtones. Si cet héritage s’est perdu petit à petit, une cheffe coutumière souhaite faire revenir les jeunes amérindiennes vers leurs racines. Plus qu’un savoir-faire, c’est une part de l’histoire kali’na qu’elle s’emploie à transmettre.

Dans la communauté Wayana, les poteries décorées découlent d’une longue tradition féminine. Mais dans des conditions rendues difficiles par l’orpaillage illégal, l’argile est de plus en plus inaccessible. Dans le village de Taluen, à l’est de la région, il ne reste que deux potières parmi les Wayanas. Portant à elles seules ce savoir-faire, la mère et la fille ont entamé un combat contre sa disparition mais surtout contre la pollution au mercure qui dévaste leur forêt.